Sept Secondes – Tom EASTON

Le Thème.

La Vie privée à l’ère du Numérique

Une Citation.

Ils passent tout leur temps à s’observer les uns les autres, à partager l’intégralité de leur vie quotidienne. Un secret ? C’est la dernière chose à laquelle ils s’attendent..

L’histoire en quelques mots.

Il existe le Premier Monde où la Vie privée n’est qu’un concept ancien et où vous n’avez pas besoin de vous battre pour vivre.  Il existe un autre monde, le Tiers Monde, où l’on rêve de se faire accepter dans le Premier Monde, de se faire implanter un téléphone dans le crâne. Même si pour ça, il faut accepter de voir sa vie – et celle des autres – défiler sur une multitude d’écrans, dans un délai de Sept Secondes.

Quand Mila rejoint le Premier Monde aidée par Julian, elle n’imagine pas que l’implantation d’un téléphone révèlera la présence d’une bombe dans son crâne. Et même si Adam, Agent Spécial a un contrôle total sur son téléphone, ces Sept petites secondes se révèleront alors être une incroyable porte de sortie.

Ce que j’en ai pensé.

Commençons par deux légers bémols, à savoir la couverture qui n’est pas à mon goût par son côté trop superficiel, même si l’univers présenté est irréel (quoique…). Et par une tournure un peu maladroite dans la traduction page 22 : « Il fait signe à Mila et, ensemble, tous deux reprennent leur route, soulagés d’échapper à l odeur de la mort ». Hormis cela, le style de la traductrice est fluide, aisé à suivre et agréable.

Et enchaînons avec les points forts… Le rythme de l’histoire est soutenu, le suspense maintenu à chaque page. Le décor clairement installé au début, facilite la compréhension des tenants et aboutissants, les rôles de chaque personnage, quand bien même ils évoluent par la suite… Si l’on peut se douter du devenir de certaines relations, l’auteur a su cultiver le mystère sur d’autres points comme les intentions réelles d’un homme mort ou celles d’une jeune fille propulsée dans l’aventure.

Cette dystopie jeunesse propose une approche des réseaux sociaux du manque d’intimité très intéressant. En pages 24-25, on peut notamment lire « Je te l’ai dit, Mila, ils enregistrent tout. Ils montrent toute leur vie sur la Toile. » Mila médite ces propos. Elle n’arrive pas à comprendre qu’on puisse vouloir être observé presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre. En revanche, elle-même verrait sans doute un certain intérêt à regarder vivre les autres. Mais aussi, de la déviance des pratiques informatiques actuelles en pages 181-182 : « Mais pourquoi me refuser ce geste anodin si vous n’avez rien à cacher? – Nous y voilà: le bon vieil argument de tous ceux qui cherchent à nous priver de nos libertés… commença Adam. – Epargnez moi ce débat d’étudiants, le voilà Miles  avec un signe de main désinvolte » Faut-il en arriver à des extrêmes pour que l’on réfléchisse à ce que l’on veut protéger? N’est-ce pas plus facile d’être vigilant dès maintenant plutôt que d’essayer de revenir en arrière lorsque nos libertés fondamentales seront bafouées ? Et lorsqu’en page 346, lors de la confrontation de Mila et du dirigeant du Premier Monde, nous lisons : Vous n’avez pas idée de ce que je suis prêt à sacrifier pour obtenir ce que je désire, répliqua le politicien sans la quitter des yeux. – Parlons-en, rebondit Mila. Qu’est-ce que vous voulez, au juste ? Pouvoir abattre les clandestins sans sommation ? Farcir le pays de caméras de surveillance? Armer la population et transformer chaque citoyen en Agent? Instaurer un régime d’espionnage, de méfiance de haine ?. J’y lis la transposition de ce qui se passe depuis quelques années, les informations que l’on préfère nous asséner régulièrement sur les réseaux sociaux, et l’absence de critique de la part de foules. L’adhésion sans poser de question, sans chercher d’autres informations que celle qui est toute prête. Et face à cela, y’a-t-il une marge avant de tomber dans la paranoïa? En tout cas, réfléchissons-y avant de nous endormir sur nos lauriers…

Il aborde également les relations entre le Premier Monde, riche et développé matériellement, et le Tiers Monde. Les dirigeants de ce dernier sont maintenus au pouvoir et s’engraissent grâce aux accords passés avec les dirigeants du Premier Monde, pour que ceux-ci accèdent aux richesses et à la production alimentaire des habitants du Tiers Monde. Eux vivent dans la misère, la guerre et la terreur. Là aussi, ne peut-on pas y percevoir une étrange ressemblance et donc une critique du monde actuel ?

En somme, ce roman d’aventure haletant, est entraînant grâce à un savant mélange de moments passés et présents, de calme et d’actions, de révélations et de mystères, mais également de réflexions très actuelles. Malheureusement, la fin est quelque peu rapide et expédiée en une page. J’ai été sacrément frustrée d’avoir fini sur cette résolution aussi peu détaillée et à mon avis trop gentille, qui n’est pas à la hauteur de toute l’action passée. J’y aurais vu une autre fin, avec pourquoi pas une suite…

Je remercie les Editions Lumen ainsi que le forum Au Coeur de l’Imaginarium pour cette lecture agréable, divertissante mais néanmoins porteuse d’un message auquel je suis sensible…

4 réflexions sur “Sept Secondes – Tom EASTON

  1. Je vois ce livre de plus en plus chroniqué, et avec d’excellents avis à chaque fois ! Et le thème actuel est intéressant.
    Et j’aime bien comme tu fais la différence entre la traduction d’un livre et la plume de l’auteur. Effectivement, une mauvaise traduction peut tout changer :s

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    • Je me suis vraiment rendue compte de l’importance de la traduction avec certains livres. Certains peuvent vraiment t’éloigner d’un livre très intéressant et même bien écrit à la base. Pour le livre, c’est vrai qu’il est prenant, mais la touche finale n’est pour moi, pas à la hauteur du travail effectué. D’autres ont-ils eu cette impression dans ce que tu as lu? Et merci pour ton commentaire…

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